Reconstruire le sport par un grand plan pour la jeunesse

La crise sanitaire place le sport amateur dans une situation pleine d’incertitude, qui peut menacer l’avenir de ces pratiques et dans laquelle le nombre de licenciés risque de chuter fortement. La crise a fait apparaitre les faibles ressources dans des secteurs prioritaires comme la santé, l’accompagnement des publics fragilisés, et le soutien à la jeunesse où le sport est en première ligne.

À quelques jours des élections municipales, les maires sont quasi unanimes sur les bienfaits des pratiques du sport amateur sur la formation des jeunes. En effet, le sport est bien plus qu’un espace de compétition, c’est avant tout un acteur majeur de l’éducation des jeunes des territoires ruraux et urbains. Le sport développe des savoir-être indispensables de la vie des personnes, comme le fait de savoir vivre avec des personnes différentes de soi, ce qui peut protéger contre le racisme, de créer du lien collectif avec d’autres personnes, ou encore de savoir se fixer des objectifs. Oui, le sport ne sert pas qu’à faire des champions, il peut demain être un espace de recrutement hors norme pour les entreprises françaises.

Hélas, depuis plusieurs décennies, le sport amateur connait des difficultés considérables : baisse significative des emplois aidés en 2017 (plus de 50 000 emplois disparus dans le sport amateur), fragilité et précarité des emplois d’éducateur sportif notamment dans les territoires difficiles (urbains et ruraux), faible reconnaissance des acteurs de l’ombre fortement engagés (éducateurs et bénévoles), renvoi d’une partie de la taxe Buffet dans les caisses de Bercy, éloignement du sport professionnel et des pratiques amateur….

Un grand projet populaire pour la jeunesse par le sport.

Les principaux acteurs du sport (villes, fédérations, associations, entreprises) ont souhaité se regrouper pour lancer l’association nationale de la performance sociale du sport*, avec le soutien actif de la ministre des Sports et de l’Agence nationale du sport ; avec pour dessein de créer une grande dynamique d’inclusion des jeunes par le sport et ainsi donner une vision nouvelle aux pratiques sportives.

Les pratiques sportives amateurs sont des plus innovantes dans le pays. La Fédération Française de Voile lance par exemple un programme inédit d’insertion des jeunes dans les clubs de voile et dans l’industrie nautique. Quatre acteurs associatifs à Mulhouse, Strasbourg, Torcy et Roubaix développeront des parcours pour des jeunes sortis du système scolaire prématurément pour les accompagner vers l’emploi. Ces deux projets sont lauréats du plan d’investissements des compétences lancé par le ministère du Travail où plus de 20 millions d’euros sont investis dans des projets qui reconnaissent la capacité du sport à insérer des jeunes faiblement diplômés. Le ministère de la Ville a lui aussi financé massivement de nombreux projets locaux d’éducation et d’insertion des
jeunes dans les quartiers prioritaires.

C’est sans doute sur la formation et les nouveaux métiers que le potentiel est le plus important, et notamment dans la formation de l’élite du sport de demain par l’apprentissage. La récente réforme de l’apprentissage a ainsi permis au Comité d’Organisation de la Coupe du monde de rugby 2023 de créer son propre Centre de Formation des Apprentis. Dès septembre, il permettra le recrutement de 2023 jeunes âgés de 18 à 29 ans qui obtiendront à l’issue d’une formation pratique et théorique un diplôme de niveau BAC, BAC+3 ou BAC+5. Durant leur cursus, ils aideront les clubs amateurs de rugby mais aussi d’autres sports à se structurer. Leur expérience se conclura par la participation à la livraison du 3e événement sportif mondial qu’est la Coupe du monde de rugby.

Des programmes comme celui de l’Agence pour l’éducation par le sport, qui vient d’insérer plus de 300 jeunes dans les secteurs bancaire et de la santé, témoignent là aussi d’un potentiel important des pratiques sportives dans l’inclusion.

Cette grande dynamique nationale que nous mettons en place doit prendre ancrage sur les territoires avec les élus, les associations mais aussi les entreprises, qui dans le cadre de la RSE pourront demain soutenir plus fortement les clubs locaux. Ces derniers sont en capacité de jouer un rôle important dans le repérage des jeunes et dans l’accompagnement dans l’entreprise.

Pour un plan pour la jeunesse par le sport

Afin de s’engager collectivement dans un grand plan pour la jeunesse, plusieurs propositions sont à mettre en œuvre autour d’un pacte de la performance sociale du sport, qui sera présenté à la mi-juillet :

  • Les villes doivent s’engager sur la prochaine mandature en identifiant demain des services d’insertion par le sport, afin de mieux soutenir les clubs qui s’engagent dans ces projets innovants et dans le but de modifier les ressources des clubs en leur permettant de devenir des acteurs de l’économie sociale et solidaire et de moins dépendre des finances publiques. De nombreuses villes ont déjà commencé, à Roubaix, Arras, Hérouville-Saint-Clair, Chanteloup-les-Vignes, Montceau-les-Mines, Calais, Allonnes….
  • Les grands évènements sportifs français, comme le Tour de France, Roland Garros, ou encore les championnats de football ou de rugby professionnels, doivent innover et soutenir plus largement les pratiques amateurs à l’instar de la coupe du monde de rugby, qui va embaucher 2023 apprentis et les former pour diriger demain les clubs sportifs.
  • Les fédérations sportives doivent s’engager demain pour des plans de performance sociale en lien avec leurs clubs, où le potentiel est considérable. Le projet de la fédération française de voile « La mer est à vous » à destination des jeunes sans diplômes fera date pour d’autres fédérations.
  • Enfin, la performance sociale du sport doit se doter d’un outil ambitieux, le premier « fonds d’innovation sociale par le sport » pour accompagner localement les 100 bonnes pratiques sur ce sujet. L’ensemble des acteurs du monde sportif et économique sera mobilisé pour abonder ce fonds qui fera évoluer les bons projets.

*Le 10 juin l’association nationale de la performance sociale du sport est créée. Elle mobilise les acteurs fédéraux, les villes, les entreprises et les associations souhaitant créer une grande dynamique collective autour de l’inclusion et de l’éducation des jeunes par le sport.

Liste des signataires.
Jean-Philippe Acensi, président de l’APELS ; Catherine Arenou, maire de Chanteloup-les-Vignes, première vice-présidente de la Communauté urbaine Grand Paris Seine & Oise, vice-présidente du conseil départemental des Yvelines ; Claude Atcher, directeur général de la Coupe du Monde de Rugby France 2023 ; Nadia Bellaoui, secrétaire générale de la Ligue de l’enseignement ; Thomas Collet, membre du comité exécutif du CJD France ; Brigitte Deydier, cadre à l’Agence nationale du Sport ; Yves Grognou, directeur de l’Addap 13 ; Nicolas Hénard, président de la Fédération Française de Voile ; Stéphane Hengy, directeur de l’Élan sportif ; Nathalie Huet, membre du Conseil d’Administration de la Fédération Française de Badminton ; Marie Claude Jarrot, maire de Montceau-les-Mines, membre du comité directeur de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité ; Didier Leprince, maire de Fontvannes, conseiller départemental de l’Aube, conseiller communautaire de Troyes Champagne Métropole, membre du comité directeur de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité ; Véronique Moreira, présidente de l’USEP ; Jérome Saddier, vice-président délégué du Crédit coopératif, président d’ESS France, président de l’Avise ; Ryadh Sallem, fondateur et délégué général de CAPSAAA ; Éric Sanchez, directeur valorisation et initiatives sociales chez AG2R LA MONDIALE ; Jean-Pierre Siutat, président de la Fédération Française de Basketball ; Christian Valette, directeur général du Crédit agricole Nord de France ; Nicolas Verdon, délégué général de la Fédération Nationale Profession Sport et Loisirs.